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samedi, 03 décembre 2005

Magique comme un profond sommeil...

Assez jouissif, et même très jouissif l’édito de Val sur la laïcité, dans Charlie du 30/11.
Pour une fois, le beau philippe oublie de se prendre pour sloterdjik et deleuze réunis et, hormis quelques allusions à platon, un détour par épicure, un salut à averroès, un hommage à saint Louis (merci, Philippe), une incise sur picasso et vélasquez et un bredouillis hugolâtre et villonesque, on peut dire qu’il fait presque dans la sobriété.
Salutaire sobriété qui lui permet de découvrir que le commentaire du texte (sacré ou non) est « l’expression même de notre liberté ». Ce que l’on savait déjà depuis un certain temps mais qui ne peut que réjouir les armées de talmudistes juifs intégristes qui arrêtent pas d’exégéser la Torah depuis des siècles ou les Pères de l’Eglise les plus orthodoxes qui n’ont pas cessé de commenter la Bible et les Ecritures en long en large et en travers … La laïcité serait alors déjà présente au cœur même de la religion… C’est à n’y plus rien comprendre et je vois d’ici briand, ferry et gambetta en train de s’arracher la moustache…
Suit une affirmation grandiose, de celles qui haussent philippe val au-dessus de l’humanité ordinaire : « La littérature appartient à celui qui la lit, tandis que le texte sacré possède celui qui le récite. » Et pourtant, moi, Lou, quand je lis du Céline vautrée sur mon plumard, il m’arrive d’être complètement possédée par le rythme, les sons, le ton, le sens de la phrase célinienne, et je voudrais pas t’emmerder, Philippe, mais n’est-ce point tonton Marcel qui écrit au début de la Recherche : « L’intérêt de la lecture, magique comme un profond sommeil, avait donné le change à mes oreilles hallucinées et effacé la cloche d’or sur la surface du silence… » ? Par ailleurs, les versets souvent laborieux de la Bible me pousseraient plutôt vers la critique ou l’exégèse… Dois-je consulter, Philippe ?
Mais poursuivons pour arriver enfin au cœur de la matière en fusion : « La laïcité se crée par un effort intellectuel constant qui met à distance tout ce qui exerce un pouvoir sans expliquer pourquoi, afin d’en évaluer les avantages et les inconvénients. » Je crains fort que nos démocraties, et nos démocrates,  soient bien loin de cette saine laïcité que val appelle de ses vœux. Quoi de plus étranger à cette « mise à distance », lorsqu’il s’agit de la démocratie elle-même qui est le seul véritable impensé de la modernité et le seul véritable sacré de nos sociétés ? Il suffit pour s’en persuader de voir comment ce mot revient des centaines de fois, dans tous les discours, mêlé à toutes les sauces et à toutes les causes, de voir comment il joue ce rôle magique de sésame qui dissout toutes les oppositions, élimine toutes les contradictions, crée une unanimité purement superficielle mais bien commode pour que continue à s’exercer le pouvoir de domination idéologique qui maintient le statu quo médiatico-politique.
Il y a beau temps que la démocratie, pas plus le mot que la chose, n’est plus analysée, décortiquée, pesée, soupesée, étudiée et qu’elle est un simple gris-gris permettant de franchir sans encombres les chicanes qui mènent au pouvoir, le mot de passe qui donne accès au saint des saints…
Et lorsque le beau Philippe, poursuivant sur sa lancée, évoque, comme autant de « choses dangereuses qu’on laisse prospérer sans y penser », l’appartenance ethnique, religieuse, sexuelle… il oublie l’essentiel : l’appartenance idéologique, ce gros « bon sens » démocratique qui n’est rien autre qu’avachissement de la pensée, flemme intellectuelle, préjugé hypnotique, conservatisme tactique et vanité politicienne…
S’il y a un combat à mener, en ce centenaire de la loi sur la laïcité, c’est celui de la séparation de la Démocratie et de l’Etat.
Allez, Philippe, j’t’emmène faire un tour du côté de tonton Maurras… OK ?
Lou naïve…

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